Roberto Pellegrinuzzi
du 8 septembre 1989 au 8 octobre 1989 Le passage, la chute, le naufrage
La photographie n’est pas seulement le lieu où l’on se rappelle que notre emprise sur le réel est illusoire. Elle est aussi un moyen de rendre compte de la précarité de l’image et d’utiliser celle-ci comme proposition de réaménagement de l’espace-temps. C’est ce que Roberto Pellegrinuzzi réussit à construire par le biais d’œuvres qui simulent la stabilité et enveloppent de désirs brisés (La chute, Le passage, Le naufrage, ...) le cadre photographique. En utilisant ce qu’on appelle du mobilier dans le quel il intègre la photographie, l’artiste déjoue la "loi" qui régit spécifiquement ce médium : l’attache documentaire, la référence inévitable. Certes, nul n’y échappe. Cependant, un travail à ce niveau demeure possible. Dans ce sens, l’œuvre de Roberto Pellegrinuzzi constitue précisément une "alternative" (parmi d’autres) à la pratique photographique qu’il explique en ces termes : « Malgré le caractère indiciel de la photographie, celle-ci m’apparât pourtant en discontinuité avec ce qu’elle représente parce qu’opérant des détours et des distances ».
En ce qui a trait à la structure de l’œuvre, celle-ci favorise un travail sur le support en fonction de sa capacité à "absorber" le dynamisme de l’image. Bureau, table et armoire sont dont utilisés à titre de composantes (statiques) de l’œuvre photographique : comme des supports sur lesquels on s’affaire afin d’arriver à polariser toute l’énergie de la forme, de la couleur, ou encore de la lumière. Aussi (et de cette façon) l’illusion se trouve être brisée par la présence d’objets concrets et leur impact au niveau de la perception ; parce qu’ils sont en rupture avec la fluidité de l’image. Ce qui confère à la photographie un caractère pragmatique témoignant d’une volonté de reconstruction. « Mon travail ne présente pas la photographie comme une représentation mais en questionne le réalisme ». Ainsi l’artiste propose une approche relativement attentive au problème de la "périphérie". Que se passe-t-il autour de l’objectif ? Quelle place prend la photographie ? Nous document-t-elle toujours ? Et à propos de quoi le fait-elle ? Assurément, Pellegrinuzzi déborde de l’espace photographique, mais il en cautionne le cadre.
Cependant, en quoi consiste, ici précisément, l’essence photographique ? Et à quoi se rattache-t-elle dans un espace-temps ponctué de retours à un réalisme qui se concrétise dans la mise en scène d’objets symbolisant la stabilité (le meuble) ? D’une part, il semble que l’iconographie choisie, et la mise en forme du mouvement qui y est supposée prétende davantage à une réflexion sur le médium en tant qu’outil qu’à la production d’œuvres qui voudraient rendre exhaustif un questionnement sur le représente. D’autre part, l’énergie que retient la pellicule constitue le lieu où est donné le rythme de ce qu’on pourrait appeler le photographique. Pour cela, ce que nous retenons de l’œuvre de Roberto Pellegrinuzzi, c’est la part active que prend le spectateur à la définition d’un réel effectif. Et dans ces conditions, lui seul peut meubler son regard...
- Communiqué de presse (Optica)
Roberto Pellegrinuzzi vit à Montréal. Il y a poursuivi des études en arts visuels ainsi qu’à Québec. Il a pris part à plusieurs expositions de groupe dont « Paysage » montrée à la Contemporary Art Gallery à Vancouver, au Center Eye à Calgary et à la galerie Dazibao à Montréal. Il a aussi présenté son travail à la Southern Alberta Gallery à Lethbridge et récemment, il se joignait à une équipe qui s’intéresse particulièrement au développement des Studios d’été de Saint-Jean-Port-Joli.
Bibliographie
Dion, François, « Bonjour les Arts visuels », Voir, 24 au 30 août 1989.
Gravel, Claire, « Le Mois de la photo: Les trafiquants d'images ont aussi leur place », Cahier, mercredi 27 septembre 1987.