Manuela Lalic
du 19 janvier 2013 au 23 février 2013 Activisme timide
Les installations de Manuela Lalic se présentent comme des espaces voués à la démesure que caractérise une pratique de la surabondance, dissimulant toutefois un souci d’ordre minimaliste. Sans pour autant saturer les lieux qu’elles investissent – quoiqu’en les contaminant considérablement –, ces interventions mettent en place une série d’associations empruntant leurs composantes à l’inépuisable société de consommation.
Évidés le plus souvent de leur fonction initiale, les éléments hétéroclites que l’artiste réactive semblent davantage sélectionnés pour leurs qualités formelles et le pouvoir d’évocation qui résulte de l’hybridité aussi séduisante qu’insoupçonnée de leurs combinaisons. Ce « choc des hétérogènes(1) » est symptomatique d’une recherche visant à révéler le potentiel poétique de notre environnement quotidien. À la fois critiques, les micro-actions organiques et quasi-scientifiques que l’artiste met à l’épreuve offrent différentes narrations ponctuées par la disposition hiérarchique des éléments dans l’espace et le simulacre d’une dichotomie nature/culture.
Cette production polymorphe révèle une propension de l’artiste à l’excès qui s’incarne dans le chaos transitoire d’un échec fonctionnaliste. À l’instar des agencements de motifs, c’est également ce qu’évoquent les masses instables et informes qui apparaissent fréquemment dans ses installations. Ainsi, l’oeuvre présentée chez Optica se compose de milliers de trombones tordus – éléments récurrents depuis 1998 –, ici éparpillés sur une surface épurée. Cette masse diffuse agit pour Lalic sur l’ambivalence d’un constat du temps perdu évoquée par le geste répétitif et mécanique de son assemblage. Face à la faillite que constitue cette action, elle y voit la métaphore d’un élan collectif concentré dans une obstination solitaire. Cette conduite n’est pas sans rappeler le principe de la perte, « qui doit être la plus grande possible pour que l’activité prenne son véritable sens(2) ». L’énergie ainsi dépensée manifeste un désir d’investissement qui échappe à l’inertie, aussi improductif que puisse sembler le geste. Comparable à une banquise, la surface à laquelle s’agrippe cette structure désarticulée cherche à accroître sa nature organique, tout en y accentuant le désœuvrement.
Certes ironique, l’« activisme timide » de Lalic se révèle alors dans la caricature d’un paysage glacial confronté à un inventaire d’étrangetés, le tout dissimulant la critique d’une société qui tend sans cesse à préfabriquer et standardiser les multiples facettes de notre existence.
Alexandre Poulin
1. Jacques Rancière, Malaise dans l’esthétique, Paris, Galilée, 2004, 173 p.
2. Georges Bataille, La part maudite [1967] précédée de La notion de dépense [1949], Paris, Les éditions de minuit, 2011, p. 24.
L’artiste remercie le Conseil des arts et des lettres du Québec.
«Activisme timide» est brièvement mentionnée et recommandée dans l'article de Nicolas Mavrikakis, Pistes hivernales ( Voir, 10 janvier 2013).
D’origine française, Manuela Lalic possède un diplôme de maîtrise en arts plastiques de l’Université du Québec à Montréal (2000). Finaliste du prix Powerhouse 2012 et récipiendaire de la bourse Pratt et Whitney Canada (2009), elle a entre autres présenté son travail au Canada, aux États-Unis, en France, en Allemagne, au Liban, au Japon, en Chine et, plus récemment, en Serbie.
Marjolaine Bourdua
du 19 janvier 2013 au 23 février 2013
La pratique de Marjolaine Bourdua porte sur l’exploration du médium sonore qu’elle combine à la réalisation d’environnements, de sculptures et de dessins. Il résulte de ce maillage un univers construit à partir d’un répertoire culturel et populaire, aux formes sculptées et dessinées, jamais clairement énoncées. À travers les variations d’un motif puisé au monde du spectacle – la scène –, ses œuvres s’inscrivent dans le registre de la rupture et du simulacre. Elles nous placent en situation d’attente sans offrir d’ancrage temporel indiquant si la performance est terminée ou sur le point de débuter. Alors que Bourdua travaillait le son et la matérialité plastique de manière indépendante dans ses projets antérieurs, sa pratique actuelle se concentre depuis peu sur leur amalgame au sein d’une même sculpture.
Dans son ouvrage La société du spectacle, Guy Debord décrivait le fétichisme de la marchandise et sa mise en spectacle en termes de syndrome illustrant l’emprise du système capitaliste sur le quotidien. Ici, le caractère simple et sommaire de l’œuvre, où abondent les références à l’espace théâtral inoccupé, paraît faire écho à cet essai politique en proposant une expérience événementielle anti-spectaculaire, inscrite en marge de la consommation de masse et du marché. La banalité intentionnelle et la pauvreté des éléments qui en constituent le décor ainsi que l’absence de spectacle accentuent ce postulat en créant un état de latence, caractéristique de la pratique de l’artiste. Maintenue à distance, une scène invite le spectateur à combler ce vide selon ses interprétations et ses références culturelles.
Quant à la trame sonore diffusée en boucle, elle interfère et établit un dialogue complexe avec les composantes physiques de la sculpture. Alliant diverses sources phonographiques – échantillonnages, explorations vocales et lignes mélodiques – les sons ici amorcés, aussitôt interrompus, participent à l’élaboration d’un système référentiel et perceptif à la fois inachevé et perpétuellement contredit. Alors que la société de consommation s’appuie sur la stimulation et la construction du désir de possession, Bourdua nous invite à réfléchir à la portée métaphorique d’un objet qui émet un langage singulier aux antipodes de la superficialité de la dite société du spectacle.
Julie Alary Lavallée
L’artiste remercie le Conseil des arts du Canada et Raphaël Huppé-Alvarez.
Marjolaine Bourdua sera chez OPTICA le samedi 23 février 2013 à partir de 14h, venez la rencontrer.
La sculpture sonore de Marjolaine Bourdua, présentée du 19 janvier au 23 février 2013, fait l'objet d'un court article de Karine Bouchard, L'inquiétante étrangeté d'une présence sonore (Webzine, Vie des arts, mercredi 20 février 2013).
Née en 1983, Marjolaine Bourdua est détentrice d’un baccalauréat en arts visuels et médiatiques de l’Université du Québec à Montréal (2007) et d’une maîtrise en arts visuels de la Villa Arson en France (2008). Elle a agi comme commissaire et pris part à de nombreuses expositions ici et à l’étranger – à la Galerie Frédéric Giroux (Paris), Centre d’art et diffusion Clark, Circa, Galerie Verticale, Sporobole et au Musée d’art contemporain des Laurentides. Il s’agit de sa première exposition solo à Montréal. Récipiendaire d’une bourse de la relève du Conseil des arts et des lettres du Québec (2011) et d’une subvention de projet du Conseil des Arts du Canada (2012), elle vit et travaille à Montréal.
Date limite | Deadline
le 28 février 2013 28 février : appel à projets (programmation 2014)
Pour plus d'informations, consultez la fiche virtuelle détaillée concernant notre appel à projets annuel.
Noémi McComber
du 16 mars 2013 au 20 avril 2013 Mise en échec
Si les dernières œuvres présentées au Québec par Noémi McComber semblent préconiser un intérêt marqué pour l’espace public – La peau du bronze, Maison des arts de Laval; Nouveaux drapeaux pour vieux monuments, Dare Dare; Déploiement en règle, Viva! Art Action (2011) –, les récentes vidéos qui composent Mise en échec permettent de renouer avec la pratique performative antérieure de l’artiste, inscrivant dans la sphère domestique une réflexion non moins politique.
Fidèles à une approche féministe, les vidéos-performances dans lesquelles McComber se met en scène soulèvent des questions quant au confinement de la femme dans un espace privé que l’on sait codifié, un espace hautement symbolique qu’elle ne manque pas de défier, de transgresser, en y exacerbant les contraintes matérielles et fonctionnelles. Ainsi, l’artiste reprend une méthodologie qui fait écho à son corpus d’interventions publiques, abordant le détournement comme condition inhérente d’une démarche se déployant dans l’univers du risque, nous entraînant sur ce terrain glissant et imprévisible qu’est l’exploration des limites prescrites en société.
D’un ludisme sous tension, la série présentée chez Optica exprime un climat de résistance que la protagoniste performe par des actes d’agressions subies ou commises. Véritables fictions d’une lutte de pouvoir, ces actions induisent une forme de narrativité supposant une constante rivalité entre l’artiste et un Autre qui nous est inconnu. Dissidente et visiblement excédée, McComber pousse le spectateur-témoin dans un voyeurisme malaisé, cherchant à susciter chez lui un effet de catharsis par l’entremise d’expériences émotives réprimées ou refoulées.
Polysémique, Mise en échec permet certes une réflexion sur le rôle de la femme et, plus largement, de tout individu dans la sphère sociale. Toutefois, les stratégies esthétiques employées – privilégiant la négation et la violence – nous portent à réfléchir ces mêmes rapports de force que l’artiste engage sous forme de négociation avec la matière. Le tout s’inscrit dans l’optique d’une brèche activant le sujet vers son émancipation : une sorte de défiance exploitée pour son caractère libérateur et fondamentalement résistant.
Alexandre Poulin
L'artiste remercie Helena Martin Franco, Stéphanie Chabot, Stéphanie Bertrand, Josh Worman et le Centre des arts actuels Skol.
Noémi McComber sera présente chez OPTICA le samedi 20 avril à compter de 14h. Venez la rencontrer!
L'exposition «Mise en échec» de Noémi McComber fait l'objet d'un article de Maude Lefebvre, Mise en échec de Noémi McComber à OPTICA (The Belgo Report, mars 2013). Il en est également question lors d'une entrevue accordée par Noémi McComber à Bettina Forget dans le cadre de l'émission No More Radio, diffusée le 14 avril 2013.
En vente chez OPTICA jusqu'au 20 avril
Noémi McComber, Prise d'assaut, 2011 (1/3)
Impression jet d'encre
Hahnemühle Photo Rag : fini mat, 100% coton, sans acide, épaisseur 308 gms.
43 x 56 cm. (papier), 45 x 58 cm. (encadrée)
Signée au verso
1 070$ / 1 200$ (encadrée)
Diplômée en 2002 d’une maîtrise en arts visuels au Chelsea College of Art (Londres), Noémi McComber a présenté son travail au Canada, en Colombie et en Europe, notamment en Finlande, en Grèce et en Russie. Elle poursuit également une pratique de commissaire avec le collectif de diffusion l’Araignée et est active au sein du centre d’artistes féministe La Centrale (Montréal) depuis 2007.
La pratique conceptuelle de Hyang Cho porte essentiellement sur le langage, qu’elle rend performatif : « Je l’emploie comme matière première pour remettre en question les contradictions propres à divers systèmes de la société dans laquelle je vis aujourd’hui, de ma position ‘d’observatrice en marge’. » L’artiste élabore des protocoles de travail rigoureux et s’assigne l’exercice de retranscrire les œuvres majeures de philosophes (Baruch Spinoza dans The Rest is Silence, 2011), de musiciens (Johann Sebastian Bach dans Three Variations of Two Part Inventions, 2009) et d’écrivains (Mary Shelly dans Frankenstein, 2009). Ne partageant ni leur discipline de prédilection, ni leur langue maternelle, elle interroge notamment la notion d’autorité. Procès dévoile un nouveau corpus intimement lié au roman Der Process (1925) de Franz Kafka.
Dans Trial I, Cho reproduit le plus fidèlement possible – ratures et taches d’encres comprises – 26 pages tirées du manuscrit original en allemand, conservé au Literaturmuseum der Moderne (Marbach am Neckar, Allemagne). Issus du neuvième chapitre intitulé « Im Dom » (À la cathédrale), les extraits disponibles sur Internet ont été téléchargés, imprimés, puis méticuleusement tracés à la mine de plomb en trois exemplaires (quasi) identiques. Classés en ordre anti-chronologique et intercalés de feuilles vierges, les ‘dessins’ obtenus sont compilés en trois livres non reliés, disposés côte à côte sur une tablette. Bien qu’une telle présentation rappelle certaines normes archivistiques et conventions muséales, le spectateur est autorisé à manipuler les objets exposés ici.
Trial II s’inscrit davantage dans le registre sculptural et sollicite le corps, tant dans son processus de création que de réception. Un rouleau de papier Stonehenge de 11 mètres de long, déposé sur un socle au ras du sol, témoigne d’une tentative de l’artiste de transcrire la version anglaise de l’ouvrage de Kafka, au rythme accéléré de l’écoute d’un livre audio – une activité inlassablement répétée jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’espace à remplir. Le texte qui en résulte, incomplet et pratiquement illisible, débouche sur une approche sémiotique de l’écriture : réduite à une surface recouverte de signes, l’œuvre renvoie à la matérialité graphique et aux limites de l’acte d’écrire. Somme toute, Cho révèle l’incapacité mutuelle de l’artiste et du spectateur à rendre intelligibles toutes les étapes d’une médiation, un travail sur le décalage original/copie/simulacre (Deleuze) et les multiples « pertes de la traduction(1) ».
1. Lost in translation, une expression intraduisible en soi.
Geneviève Bédard
L’artiste remercie le Conseil des arts de l’Ontario.
Après avoir complété un premier cycle en histoire à l’Université Sogang (Séoul, Corée du Sud, 1998), Hyang Cho entreprend des études en beaux-arts : elle détient un baccalauréat du Alberta College of Art and Design (2007) et une maîtrise de l’université de Guelph (2009). Bien que son travail ait été présenté dans quelques expositions individuelles et collectives à travers le Canada depuis 2006, Procès est son premier projet en sol québécois. Représentée par Georgia Scherman Projects (Toronto), Hyang Cho vit et travaille à Guelph, en Ontario.
Rodney LaTourelle
du 11 mai 2013 au 15 juin 2013 Chromakenón
Amalgame des domaines de l’art visuel et de l'architecture, la pratique de Rodney LaTourelle explore les relations affectives entre la couleur et divers arrangements spatiaux. Ses environnements peints et créés sur mesure - des peintures tridimensionnelles – ordonnent un langage visuel à la fois épuré et géométrique dont l’aspect structuré s’altère au gré de l’expérience du spectateur. Traitant de notions liées à la métaphysique et à la phénoménologie, où les effets perceptifs produits par le corps et l’esprit s’activent, son travail se conçoit autour d’installations immersives construites à différentes échelles. Il se concentre actuellement sur la mise en place de relations spécifiques entre la couleur, l’espace et le corps, recherche que l’artiste poursuit dans l’espace d’OPTICA.
Puisant à même l’histoire de l’art, LaTourelle actualise divers mouvements artistiques dont l’esthétique néo-plasticisme De Stijl et celle de la peinture Hard-edge. Il en résulte une combinaison plastique en lien avec l’architecture qui lui permet d’introduire ce traitement strict de la couleur dans le registre de la contingence et de l’imprévisibilité. Prenant en compte l’interférence de lumière naturelle et artificielle, ses installations multiplient leur potentiel perspectif en déployant une panoplie d’effets visuels et chromatiques. Transcendant les expérimentations sculpturales et génériques du minimalisme, elles engagent de nouvelles connexions affectives et physiques, parfois même, par la mise en place d’éléments structuraux amovibles.
Bien que l’espace intérieur de ces installations soit vide, ce lieu incarne un réceptacle dynamique, de forme parfois labyrinthique, constitué de multiples points d’entrées et de sorties. Comprise comme un espace à la fois naturel et illusoire, un trompe l’œil supportant « l’activation de la couleur », l’œuvre donne à la perception individuelle un rôle prédominant. Selon Anne-Marie Ninacs, le travail de LaTourelle semblerait vouloir moins traiter « de l’exploration de quelque chose - une architecture, une couleur – que de l’exploration en tant que moyen fondamental de compréhension du monde. »(1) À la lumière de cette réflexion, ces structures, qui altèrent temporairement nos sens, portent en elles la complexité du monde.
Julie Alary Lavallée
(1) Anne-Marie Ninacs, Caught in the Act : The Viewer as Performer, catalogue d’exposition, 17 octobre 2008 - 15 février 2009, Musée des beaux-arts du Canada, 2008, p. 191.
L’artiste remercie Lisa Ames, Ron et Ardis LaTourelle, Louise Whittöft, la Winnipeg Art Gallery (Helen Delacretaz, Conservatrice en chef et conservatrice des arts décoratifs), l'Atelier Clark, le Conseil des arts du
Manitoba, le Conseil des arts du Canada et Panolite.
L'exposition Chromakenón de Rodney LaTourelle est brièvement mentionnée dans l'éditorial de Serge Fisette L'aventure se poursuit... ( ESPACE sculpture, #106, hiver 2013-2014).
Né en 1965 à Winnipeg, Rodney LaTourelle est artiste, architecte et critique. Après avoir complété en 1988 des études de premier cycle en architecture (volet environnemental) à l'Université du Manitoba, il termine un programme de maîtrise en architecture du paysage en 1996 au sein de la même institution. Cumulant les expériences professionnelles de concepteur couleur, architecte paysagiste, conservateur et chercheur, il a récemment coréalisé une sculpture publique commandée par la ville de Berlin. Son travail a été exposé à plusieurs reprises en Amérique du Nord dont au Musée des beaux-arts du Canada et à la Cité de l’énergie ainsi qu’en Europe à la Program Gallery de Berlin et à la SKC Belgrade en Serbie. Il vit et travaille à Berlin.
Richard Deschênes
du 11 mai 2013 au 15 juin 2013 De la piscine aux verts
Le travail de Richard Deschênes examine essentiellement les processus de (dé)formation, de reproduction et de perception de l’image. Il propose ce qu’il appelle librement des « modèles imaginaires » : ayant fréquemment recours à du matériel existant, tels des documents encyclopédiques et des clichés d’actualité qu’il s’approprie et replace dans de nouveaux contextes, l’artiste brouille systématiquement les repères visuels et cognitifs du spectateur. Sa pratique échappe à la certitude tant au niveau formel – empruntant à la peinture, au dessin et au collage – que thématique – oscillant entre scène de genre et paysage, figuratif et abstraction.
« De la piscine aux verts » comprend une quinzaine d’œuvres tirées d’une série entamée en 2009 et à laquelle fut consacrée une résidence à la Cité Internationale des arts de Paris en 2011. Construites à partir d’images trouvées issues de divers quotidiens, elles remettent en question la nature même de la photographie journalistique. Deschênes détourne sa fonction documentaire et
« l’affranchit de ses chaînes référentielles »(1) en effaçant toute trace de l’action captée à l’origine, un procédé de soustraction de l’information par l’addition de minces couches de papier journal méticuleusement sélectionnées, tranchées, disposées et collées. Ce processus simultané de camouflage du sujet central et de dévoilement/création d’un arrière-plan qui investira désormais l’ensemble du cadre prend fin lors de l’épuisement de la matière première disponible, provenant de différentes copies de la même photographie. Or le procédé ne se révèle pas d’emblée – s’éloignant ainsi du collage traditionnel, où la manière est souvent manifeste – et seules les cicatrices à peine perceptibles de ses délicates interventions témoignent de la matérialité du geste de cet artiste-chirurgien du réel (en lieu du virtuel que manipulent bon nombre de ses contemporains).
Les images obtenues séduisent et déroutent : fragilité, absence, contemplation, silence… Elles nous semblent parfois familières, marquées d’une inquiétante étrangeté (Unheimlich). D’instinct, l’œil parcourt ces monochromes, paysages et « lieux psychologiques » – comme les désigne habilement Deschênes – à la recherche de ce sur quoi la lentille aurait fait sa mise au point, mais en vain. Certains indices de la trame originale persistent toutefois, tant au niveau de l’impression que de la narration : les figures disparues sont notamment évoquées au fil des titres des œuvres, qui reprennent les légendes des clichés de départ, insufflant une dimension poétique à ces notices descriptives dorénavant privées d’ancrages visuels.
Geneviève Bédard
(1) Bernard Schütze, « Images en transit », Richard Deschênes – Transfert, EXPRESSION, Centre d’exposition de Saint-Hyacinthe, 2012.
Après un baccalauréat en arts visuels de l’Université Concordia (1985), Richard Deschênes a pousuivi ses études au Pratt Graphics Center à New York (1985-86). Récipiendaire de plusieurs bourses et résidences, il a présenté son travail dans de nombreuses expositions individuelles et collectives au Canada, au Mexique, en Chine, en Espagne, en Autriche, aux États-Unis, en France et au Japon. Richard Deschênes vit et travaille à Montréal.
Elina Brotherus
du 7 septembre 2013 au 17 octobre 2013 Le Mois de la Photo à Montréal : Drone, L'image automatisée
*L'exposition est prolongée jusqu'au 17 octobre*
À l’occasion de sa 13e édition, Le Mois de la Photo à Montréal a invité le réputé commissaire britannique Paul Wombell à articuler sa programmation autour du thème Drone : l’image automatisée. Du 5 septembre au 5 octobre 2013, vingt-cinq expositions déployées sur différents sites transformeront la ville en une vaste exposition de photographie. Ce projet vise à cartographier la relation en constante mutation entre l’appareil photo et le corps humain.
Dans les œuvres d’Elina Brotherus, dont la vidéo Artists at Work (2010) et la série photographique 12 ans après (1999-2012), deux sujets reviennent souvent : l’artiste elle-même et l’appareil photo. Intéressée depuis longtemps par la représentation de l’artiste comme modèle, elle campe ostensiblement sa propre figure dans presque toutes ses photographies et vidéos. Les autoportraits de Brotherus la montrent dans des paysages majestueux ou dans des espaces confinés, où se reflètent diverses émotions allant de la mélancolie à la colère, de la perplexité à la sérénité. De son deuxième sujet, on aperçoit parfois le déclencheur souple dont le fil serpente au sol en direction de ses mains, l’appareil demeurant hors champ. Dans ses œuvres plus récentes, l’appareil photo apparaît dans l’image, partageant l’espace avec l’artiste.
Pour sa 13e édition, Le Mois de la Photo à Montréal présentera, en collaboration avec Optica, un centre d’art contemporain, 12 ans après d’Elina Brotherus.
Source :: Le Mois de la Photo à Montréal :: Relations de presse
François Bernier
francois.bernier@moisdelaphoto.com
T 1 514 390 0383
Visite commentée de l'exposition par Anthony Burnham, samedi 28 septembre à 15h. Activité gratuite organisée dans le cadre des Journées de la culture.
Entrevue avec Paul Wombell, commissaire invité du Mois de la Photo à Montréal, sur le blogue Lèche-Vitrine.
Née en 1972 à Helsinki, Elina Brotherus partage son temps entre la France et la Finlande. Elle a obtenu une maîtrise en photographie de la University of Art and Design Helsinki en 2000. Ses œuvres ont fait l’objet d’expositions individuelles et collectives partout dans le monde, entre autres à la Photographers’ Gallery à Londres (2013) ; au Festival international de photographie de Lianzhou (2012) ; au Musée d’art moderne et d’art contemporain de Liège (2012) ; au Louisiana Museum of Modern Art à Humlebæk, au Danemark (2012) ; au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles (2012) ; au Sørlandets Kunstmuseum à Kristiansand, en Norvège (2011) ; au Bloomberg Space à Londres (2010) ; au Finnish Museum of Photography à Helsinki (2009) ; et au National Art Center à Tokyo (2008). Elle est lauréate de nombreuses bourses et récompenses, et ses œuvres font partie de collections publiques majeures. Brotherus est représentée par gb agency à Paris, the Wapping Project Bankside à Londres et la Martin Asbæk Gallery à Copenhague.
Paul Wombell
du 7 septembre 2013 au 12 octobre 2013 La publication Drone : l'image automatisée en vente chez OPTICA
Drone : l’image automatisée est la publication officielle de la 13e édition du Mois de la Photo à Montréal. Bien plus qu’un catalogue d’exposition, cet ouvrage de référence abondamment illustré présente les œuvres des vingt-cinq expositions de l’événement, et comprend des essais rédigés par des experts en art contemporain et en technologie. Pour la première fois, Le Mois de la Photo à Montréal a réalisé sa publication en collaboration avec Kerber Verlag, un éditeur allemand reconnu pour la qualité de ses livres d’art.
L’appareil photo n’est pas seulement un outil en attente d’être saisi et utilisé, mais aussi un instrument sophistiqué possédant ses propres lois, son propre fonctionnement, voire sa propre vie. Grâce à l’automatisation de ses mécanismes – et, plus récemment, l’intégration de l’ordinateur –, l’appareil photo est désormais capable d’intention et d’action. Il peut voir ce qui est invisible à l’oeil nu, fonctionner sans relâche, atteindre des endroits inaccessibles ou dangereux, et il peut aussi bien pénétrer le corps que voyager dans l’espace. On a longtemps considéré l’image comme étant l’aspect le plus important du processus photographique. Cependant, les artistes et les auteurs de Drone : l’image automatisée présentent une tout autre conception. Au centre de leurs préoccupations se trouve la relation en pleine mutation entre le corps et l’appareil photo, et la manière dont celui-ci peut opérer avec un minimum d’intervention. Tandis que l’humain s’appuie de plus en plus sur la technologie pour prolonger sa vision, l’appareil photo devient une extension du corps. De la télévision en circuit fermé à Google Street View, des contrôles à distance aux robots, des photomatons aux drones, l’appareil photo est en voie de redéfinir les conditions de l’existence humaine.
Auteurs :
PAUL WOMBELL (sous la dir.) – Commissaire invité du Mois de la Photo à Montréal 2013, commissaire indépendant et auteur spécialisé en photographie, Londres
JORDAN CRANDALL – Artiste, théoricien, professeur en arts visuels, Université de Californie à San Diego
FRANCINE DAGENAIS – Essayiste, théoricienne, historienne d’art, professeure à l’École des arts visuels, Université Laval, Québec
GEORGE LEGRADY – Artiste, professeur en arts médiatiques et technologies, Université de Californie à Santa Barbara
MELISSA MILES – Maître de conférences à la faculté des arts, du design et de l’architecture, Université Monash, Melbourne
JOANNA ZYLINSKA – Artiste photographe, professeure en nouveaux médias et communications, Goldsmiths University of London, Londres
Détails :
Prix : 40,00 $ (42,00 $ TPS incl.)
Format : 232 p. (162 ill. couleur, 35 ill. n&b), couverture rigide, 16,8 x 24 cm
Parution : sept. 2013
Lancement : samedi 7 sept. 2013 à 17 h, librairie Formats, 2, rue Ste-Catherine E., espace 302
Langues [2 versions] :
Français : ISBN 978-3-86678-832-9
Anglais : ISBN 978-3-86678-803-9
Éditeurs : Le Mois de la Photo à Montréal et Kerber Verlag
Design graphique : Dominique Mousseau
Diffusion : au Canada (en français par Édipresse / en anglais par D.A.P.) et à l’étranger
Appel à projets / Call for proposals
le 18 septembre 2013
En raison de son déménagement, OPTICA ne tiendra pas d'appel à projets en 2014. Pour de plus amples renseignements, veuillez nous contacter par courriel info[a]optica.ca ou suivez nous sur FACEBOOK.
La parution de cette troisième édition est prévue pour 2014. La résidence de recherche bénéficie du soutien du Ministère des Relations internationales, de la Francophonie et du Commerce extérieur du Québec, de la région Rhône-Alpes et du Consulat général de France à Québec depuis sa création.
Grande vente de déménagement
du 10 décembre 2013 au 1 mars 2014
OPTICA met en vente une partie de son mobilier ainsi que différents items de bureau! Pour connaître le détail des objets à vendre, consultez notre CATALOGUE.
Pour plus d'informations, contactez le centre par courriel info@optica.ca ou venez magasiner chez OPTICA directement!