Ramona Ramlochand
du 10 septembre 2005 au 15 octobre 2005 White Desert
«La mémoire est à l’un ce que l’histoire est à l’autre : une impossibilité. Les légendes naissent du besoin de déchiffrer l’indéchiffrable. Les souvenirs doivent s’accomoder du délire, de leur propre dérive. Un moment arrêté brûlerait comme un photogramme coincé devant la fournaise du projecteur.»
– Citation tirée d’une des lettres écrites au narrateur de Sans soleil par, semble-t-il, Chris Marker, le réalisateur du film.
Ce projet s’apparente à un délire de moments saisis puis rassemblés dans ma propre histoire (faute d’un terme plus juste), dont l’impulsion naquit dans le Désert blanc, une région du Sahara occidental. Pendant que j’y étais, j’avais l’impression d’être entrée dans le décor d’un film épique, sentiment qui m’accompagne toujours lorsque je suis dans un environnement étranger. Dans pareil environnement, mes pensées ont également tendance à vagabonder vers du familier, du connu, en quête sans doute d’une sorte de normalité dans le chaos du nouveau et l’inconnu.
Ainsi, dans les impressions numériques à jet d’encre de White Desert, le lampadaire devant ma maison (au Canada) devient la lumière qui plane, tel un vaisseau spatial extra-terrestre, sur une inoffensive butte de végétation dans un paysage aride, alors que le jeep blanc symbolise un «lieu sûr» pour le voyage et le tourisme, voire même un «chez soi» (mot porteur, pour moi, de plus de poids et de légèreté insoutenables que je ne suis prête à l’admettre). Dans Triumph : reversing forward, le panneau de bord de la Triumph TR6 est remplacé par un flâneur automatisé. La troisième installation, Maquette for Filmic Moments, reprend les autres œuvres mais à une plus petite échelle, produisant en quelque sorte une épopée plus intime.
Ce corpus d’œuvres cyclique estompe les frontières du lieu et, ce faisant, crée une nouvelle réalité visuelle/géographique. Les pièces fragmentées deviennent les échos d’un lieu qui n’appartient désormais plus à «l’ensemble» mais en fait partie tout à la fois. En retour, ces fragments deviennent des instantanés de l’intériorité d’un sujet qui n’appartient plus à un lieu précis, un sujet «sans frontières», «interpénétré», balayé par les vents de la diaspora.
- R. Ramlochand
Présentée dans le cadre de la 9ième édition du Mois de la photo à Montréal, sous le commissariat général de Martha Langford. «Ramona Ramlochand : White Desert» d’Alice Ming Wai Jim parâtra dans Image & Imagination aux presses de l’Université McGill-Queen sous la direction de Martha Langford et du Mois de la Photo à Montréal.
Bibliographie
- Ardenne, Paul, «Ramona Ramlochand : White Desert», Artpress, no 319, janvier 2005.
- Crevier, Lyne, «Ramona Ramlochand», Ici, 29 septembre - 5 octobre 2005.
- Tousignant, Isa, «Visual», Hour, 1er-7 septembre 2005, p.6.
- Wai Jim, Alice Ming. «Ramona Ramlochand : White Desert», Image & Imagination. Ed. Martha Langford. Montréal : Le Mois de la Photo à Montréal, 2005, pp.53-56.